L’autoconsommation collective : la France dans les starting-blocks ?

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Jusque-là très limitée par la réglementation, l’autoconsommation collective dispose d’un périmètre élargi depuis l’adoption de la loi Pacte fin avril. Une avancée qui pourrait accélérer considérablement son développement en France…

En moins de deux ans, l’autoconsommation d’électricité a connu une véritable révolution en France, au moins sur le plan légal. Le 28 avril 2017, un décret d’application autorisait les groupes de personnes (copropriétés, associations ou coopératives) à pratiquer l’autoconsommation alors réservée aux usages individuels. Mais tandis que plus de 20 000 foyers produisent déjà leur propre électricité, l’autoconsommation collective reste encore très anecdotique dans le pays. La faute à une réglementation stricte du code de l’énergie, qui la limitait aux installations situées à une dizaine de mètres en aval du point de distribution d’électricité à basse tension. Désormais, suite à l’adoption la loi Pacte et son article 43 bis le 11 avril, le périmètre d’autoconsommation collective sera élargi, à titre expérimental et pour une durée de cinq ans, à l’ensemble réseau de basse tension, dans la limite d’1 km. Une différence qui devrait voir exploser le nombre de candidats, jusqu’ici limité à une dizaine, dès la publication du décret d’application espéré avant l’été. D’autant que le nouvel amendement prévoit également la suppression du plafond fixé à 100 kWc pour la puissance d’installation.

« Un combat d’arrière-garde a fait traîner les choses, mais l’autoconsommation collective, créatrice de lien social, est très populaire auprès des consommateurs et des élus », assure André Joffre, président du pôle de compétitivité Derbi dédié aux énergies renouvelables (EnR). L’ouverture de l’autoconsommation collective à un plus grand nombre de bailleurs, regroupés sous l’égide d’une même personne morale, devrait même transformer le marché actuel, selon Lionel Guy, chargé de mission EnR à la Fédération nationale des collectivités concédantes et régies (FNCCR). « L’augmentation du périmètre va accélérer le rythme des expérimentations et permettre d’entrer dans une logique de gestion de projet, en travaillant non plus sur des hypothèses de tarif d’achat, mais sur des notions de coût de production du kWh et de retour sur investissement. » La nouvelle mesure permettra en outre de relier les toitures photovoltaïques de plusieurs bâtiments à un même réseau de production, évitant ainsi de scinder un quartier ou une entité en plusieurs sous-parties. Pour se regrouper, les partenaires d’un collectif devront toujours s’adresser à Enedis (ex-ERDF), qui reste l’interlocuteur unique.

Des projets portés par des grands groupes comme des petites collectivités

Comme son pendant individuel, l’autoconsommation collective consiste à produire sa propre électricité à partir de sources d’énergies renouvelables, essentiellement des panneaux photovoltaïques. La production est répartie entre plusieurs consommateurs proches physiquement et raccordée à un micro-réseau, lui-même relié au réseau électrique. En fonction des besoins et de la quantité produite, les membres du collectif peuvent rester partiellement dépendants du réseau national ou pourvoir à l’intégralité de leur consommation. Dans ce cas, le surplus peut être réinjecté sur le réseau électrique. Comme l’autoconsommation individuelle, cette pratique est aujourd’hui encouragée afin de limiter les frais d’acheminement d’électricité jusqu’au point de consommation et d’encourager la production d’une électricité moins chère et plus respectueuse de l’environnement. L’interdépendance des membres d’un même collectif doit ainsi permettre une meilleure optimisation de l’énergie. Par exemple, les ménages n’auront ainsi plus à attendre les heures creuses pour faire tourner leur machine à laver. Un véhicule électrique chargé qui stationne dans le garage pourra également alimenter le réseau collectif aux heures de pointes, puis se recharger à moindre coût durant la nuit…

Avant même l’élargissement de son périmètre, l’intérêt de l’autoconsommation collective n’avait pas échappé aux grands groupes, qui ont déjà lancé plusieurs projets concrets. Comme E.Leclerc et Brico Dépôt, le groupement Les Mousquetaires (propriétaire d’Intermarché, Netto, Bricomarché, etc.) a ainsi lancé une expérimentation avec plusieurs enseignes pour partager l’électricité produite par les toitures photovoltaïques du centre commercial Intermarché de Noirmoutier (Vendée). À Alès, c’est EDF qui a inauguré début mai 2019 une installation d’autoconsommation collective pour une résidence de 100 logements sociaux. L’électricité produite par les 600m2 de panneaux photovoltaïques disposés sur le toit devrait pourvoir à la majeure partie de la consommation des parties communes et jusqu’à 20 % des besoins en électricité des locataires. L’économie moyenne est estimée à 100 euros annuels par logement. Ce gain est notamment rendu possible en activant au bon moment les ballons d’eau chaude individuels pour stocker le surplus d’énergie. Pour accompagner cette première en France, une sensibilisation aux économies d’énergie a également été effectuée auprès des résidents. Dans le Cher, la commune de Marmagne a elle aussi misé sur l’autoconsommation collective pour alimenter neuf bâtiments publics, 61 logements et 78 points d’éclairage. Le but : fournir 69 % des besoins électriques du quartier. Grâce à la loi Pacte, cet objectif paraît plus que jamais réaliste.

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