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La Guadeloupe se lance dans la valorisation énergétique des déchets

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Pour les territoires d’outre-mer, plus encore que pour les autres collectivités françaises, l’économie circulaire représente une solution pertinente pour économiser les ressources, réduire la pollution, prévenir la production de déchets, ou collecter et valoriser ceux qui ont été générés. Les nouvelles technologies de valorisation énergétique des déchets offrent en effet une source d’énergie à la fois stable et renouvelable, et peuvent constituer une réponse intéressante aux enjeux de la transition énergétique dans les territoires insulaires. En Guadeloupe par exemple, la nouvelle unité de valorisation de biogaz de la Gabarre, inaugurée officiellement jeudi 30 novembre 2017, produira à terme 18 000 kilo/watts heure d’électricité par an, soit environ 1.5% de la production globale du département.

Les déchets, de véritables matières premières énergétiques

Freiner les exportations de déchets à valoriser vers la métropole, tout en important moins de produits et de matières premières, c’est tout l’intérêt de l’économie circulaire dans les territoires d’outre-mer. Une solution en plein développement qui se décline généralement dans le secteur de l’énergie sous plusieurs formes bien distinctes, toutes destinées à limiter au maximum le gaspillage énergétique. Parmi elles, les processus de recyclage et de revalorisation énergétique des déchets sont très prometteurs et adaptables à de nombreux domaines d’activité gourmands en énergie ou en chaleur. Un meilleur retraitement des déchets peut en effet permettre d’optimiser la qualité des matières valorisées, de diminuer la quantité des résidus ultimes non valorisés et de réguler les flux de matières. Les déchets organiques comme ceux de l’industrie agro-alimentaire, de l’agriculture ou des stations d’épuration peuvent être transformés en gaz vert (biométhane), et injectés dans le réseau de distribution de gaz naturel, ou transformés en électricité.

En Guadeloupe, le SYVADE (syndicat de valorisation des déchets de la Guadeloupe) s’est intéressé dès 2010 au potentiel des matières valorisables issues des déchets organiques. Après la réalisation de plusieurs études visant à estimer ces gisements de biogaz, le syndicat a décidé de valoriser les déchets stockés en centre d’enfouissement, en captant le gaz méthane issu de leur fermentation et en le transformant en énergie stockable. Il a lancé pour cela en 2015 un appel d’offres pour la réalisation de la première unité de valorisation de l’île, et retenu la proposition de la société d’exploitation Gabarre Énergies.

Réalisée en l’espace de 10 mois à peine (de janvier à octobre 2017) pour un budget de 3,8 millions d’euros (financés intégralement par Gabarre Energies), cette installation a été inaugurée le 30 novembre 2017 et permettra d’exploiter l’énergie dégagée par les 6 millions de tonnes de déchets enfouis sur le site de la Gabarre depuis son ouverture en 1973. Le SYVADE touchera en contrepartie une part des recettes estimée à 3 millions d’euros sur les 15 années de concession accordées à Gabarre Energie, soit quelque 200 000 euros par an, et bénéficiera en parallèle d’une réduction intéressante sur la Taxe sur les activités polluantes (TGAP).

Une réponse aux enjeux de la transition énergétique guadeloupéenne

D’un point de vue technique, le biogaz, issu de la fermentation des déchets, est capté dans les alvéoles étanches grâce à un réseau de canalisations. Épuré et refroidi, il est acheminé vers un collecteur principal, qui le transporte vers l’installation de combustion, composée de deux groupes électrogènes reliés à un alternateur. Des transformateurs récupèrent l’énergie produite et rehaussent la valeur de la tension pour l’amener de 400 à 20 000 volts, avant que l’électricité ne soit injectée sur le réseau. Grâce à ce procédé, la centrale de la Gabarre produira à terme 18 000 kilo/watts heure d’électricité par an (1,5% de la production totale de l’île) et assurera la couverture annuelle des besoins en consommation électrique de 4 196 habitants, équivalent très exactement aux besoins de communes comme Deshaies, Goyave ou encore Grand-Bourg de Marie-Galante.

Cette énergie électrique envoyée sur le réseau local et distribuée par l’opérateur historique EDF Archipel Guadeloupe, représente de fait un nouvel atout non négligeable pour la stabilité du réseau et la transition énergétique de l’île. « Cette unité incarne le décollage d’une filière qui s’inscrit de plain-pied dans la volonté du territoire d’aller vers l’autonomie énergétique, à travers une ressource 100% locale et 100% renouvelable », explique sur France Antilles Éric Le Tinier, chef de service système électrique à EDF. Les ordures constituent en effet une opportunité économique et environnementale pour les zones non interconnectées, à l’heure où les énergies fossiles commencent à s’épuiser, et le projet de la SYVADE s’inscrit dans une véritable logique de réduction de l’impact sur l’environnement immédiat du site de la Gabarre. Pour cela, la SYVADE met en œuvre notamment une gestion optimale des ressources naturelles dans une logique de « cycle de vie » et non de « fin de vie » des déchets (électricité produite à partir d’une ressource renouvelable, la biomasse), afin de diminuer la production de méthane (gaz à effet de serre) produit sur le site (qui possède un potentiel de réchauffement global 25 fois supérieur au CO²), et de participer ainsi à la réduction du bilan carbone de la production électrique guadeloupéenne. « Cette unité s’inscrit dans un nouveau modèle de développement économique, au carrefour de la croissance verte et du numérique. Il réconcilie l’économie et l’écologie », résume de son côté Jean-Michel Jumez, sous-préfet de Pointe-à-Pitre.

Par Anne-Sophie Durano

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