Le 2 décembre dernier, les Amis de la Terre étaient conviés par la Mairie de Paris au comité de suivi de l’Observatoire parisien de Réduction, Réemploi et Recyclage (O3R). Lancé en 2010 ce projet avait de quoi séduire : diminuer la masse de déchets à Paris. Si en trois ans, la Mairie de Paris a mené une série d’actions de communication, Les Amis de la Terre regrettent néanmoins l’absence d’ambition de sa politique de réduction des déchets.
Les déchets fermentescibles représentent à Paris 45 kg/habitant/an pour les déchets de cuisine et 12 kg/habitant/an pour les produits alimentaires non consommés. D’un point de vue économique, le gaspillage alimentaire représenterait 430 euros par personne et par an. Face à ce gâchis, que fait la Mairie de Paris ?
Moins de 0,1% du secteur de l’hôtellerie-restauration et de la restauration collective mobilisé contre le gaspillage alimentaire
En matière d’actions concrètes, le bilan est bien maigre : des cours de cuisine sur les marchés, un accord avec 4 restaurants, 1 traiteur, 3 hôtels et 12 cantines scolaires pour qu’ils se lancent dans une démarche « anti-gaspi ». Ces expérimentations sont-elles à la hauteur des enjeux, alors que Paris compte 721 cantines scolaires [1], 1 564 hôtels [2] et 11 519 restaurants [3] ?
« Certes, la Mairie de Paris a équipé 184 sites de compostage et organisé la fête du compostage mais quand va-t-elle enfin mettre en place une collecte séparée des gros gisements de biodéchets ? » s’interroge Claude Bascompte, Président des Amis de la Terre Paris. Près de 10 000 personnes ont déjà signé la pétition « Je veux mon bac bio » [4] pour réclamer la collecte séparée des biodéchets en France, pourquoi les parisiens feraient-ils exception ?
Des matières recyclables brûlent dans les incinérateurs
Les deux premiers gisements de la poubelle concernent les papiers et les emballages. Par souci d’exemplarité, la Mairie de Paris a d’abord souhaité agir sur ses propres déchets : réduire son utilisation de ramettes en papier, sensibiliser ses agents et diminuer le gâchis alimentaire de sa cantine. « Montrer l’exemple, c’est un minimum » relativise Claude Bascompte « mais qu’est-ce qui est prévu pour accroître la collecte séparée des papiers et emballages des parisiens ? pour favoriser le réemploi et la réparation des déchets électriques et électroniques ? pourquoi ne s’intéresser qu’aux déchets des ménages qui représentent à peine 10 % des déchets en France, alors que la ville est un tissu d’entreprises qui contribuent à alimenter ce stock important et atypique des déchets de papiers et emballages ? et surtout quelle est la stratégie pour réduire le taux d’incinération et d’enfouissement des déchets parisiens ? »
A l’heure où des grandes villes comme San Francisco, New York, Buenos Aires, Milan sont engagées dans une politique Zéro déchets et sont en bonne voie d’atteindre leurs objectifs, Paris en est encore à recenser les immeubles qui présentent des difficultés en matière de tri et a l’ambition de convaincre 40 immeubles à s’engager à réduire leurs déchets ! Une enquête menée par la ville de Paris en 2012/2013 a même constaté que 19 % des adresses n’étaient pas dotées en bacs jaunes et 40 % en bacs pour le verre ! Le volume des déchets de la Ville a baissé de 3,8%, mais aucune action volontariste n’explique cette baisse, la crise viendrait elle au secours de l’absence de politique volontariste dans ce domaine?
« Plus on trie, moins on a d’ordures ménagères résiduelles à incinérer » souligne Anne Connan du Collectif 3R [5], un collectif d’associations et de riverains de l’incinérateur géant d’Ivry-sur-Seine, principale destination des déchets parisiens.
Faut-il voir derrière cette frilosité pour le tri et la collecte sélective la pression économique de l’activité d’incinération ?
Vers une généralisation des pratiques de réduction, de réutilisation des objets et de tri des matières recyclables
Pour les Amis de la Terre, il est temps de passer d’une démarche de vitrine à une généralisation qui conduit à des réductions significatives des déchets. Il faut abandonner la consommation compulsive du tout-jetable, et inciter les entreprises et les citoyens à commercialiser et utiliser des produits durables. La ville se doit de généraliser le réemploi, de soutenir et promouvoir le secteur de la réparation. Toutes ces activités du réemploi au recyclage constituent un gisement d’emplois appréciable. Le tri demande un effort des habitants qui, pour être maintenu dans la durée, doit être soutenu par la collectivité au travers d’équipes de terrain pour impulser une attitude de prévention et de fiabilité du tri.
[1] Source : Mairie de Paris, chiffres 2013.
[2] Source : Office du Tourisme et des Congrès de Paris, chiffres 2012.
[3] Source : Office du Tourisme et des Congrès de Paris, rapport 2011 « Restauration et Tourisme à Paris »
[4] Source : CNIID http://jeveuxmonbacbio.org/
[5] Voir : http://collectif3r.blogspot.fr/
Le contenu et les informations publiés dans les tribunes relèvent de la pleine et entière responsabilité de leurs auteurs. Enviro2B ne saurait en aucun cas être tenu pour responsable des informations diffusées.
Commentaires récents