Le « préjudice environnemental » retenu à Narbonne

narbonne_region.JPGLe 4 octobre dernier, Le tribunal de grande instance de Narbonne a alloué au Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée la somme de 10 000 euros en réparation du préjudice moral subi par ce dernier du fait d’une pollution par un déversement accidentel d’insecticide. De manière encore plus exceptionnelle, il alloue la même somme en réparation du « préjudice environnemental » subi par le patrimoine naturel du Parc. Une première en France.

Rappel des faits : le 10 décembre 2004, une usine de conditionnement de produits phytosanitaires de Port La Nouvelle (la SOFT) a été responsable d’un déversement accidentel d’un volume non identifié d’insecticide, le chlorpyrifos-éthyl (cf. encart), dans un ruisseau situé en amont de l’étang de Bages-Sigean. Malgré les barrages disposés entre le point de rejet et l’étang de Bages-Sigean, des nappes d’eau contaminées ont pénétré à l’intérieur de la lagune provoquant, notamment, une mortalité importante de poisson.

Par la suite, afin de préserver la santé des consommateurs, deux arrêtés préfectoraux ont interdit la pêche, la commercialisation et la consommation des poissons de l’étang ; tout d’abord dans la partie sud le 13/12/2004, puis étendu à l’ensemble de la lagune le 22/12/2004 et ce jusqu’au 14 mars 2005.

Les communes de Narbonne, Bages, Peyriac-de-Mer ainsi que le Parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée ont déposé une plainte pour « préjudice environnemental ».

Un préjudice moral et environnemental

Après un procès en novembre 2006 et une condamnation au tribunal correctionnel sur intérêt civil, le jugement rendu le 4 octobre 2007 a condamné la SOFT au titre « du préjudice moral et environnemental ».

Le délibéré du tribunal de grande instance de Narbonne du 4 octobre 2007 précise que, « aux termes de l’article L.333-1 du code de l’environnement, les Parcs naturels régionaux concourent à la politique de protection de l’environnement et constituent le cadre privilégié des actions menées par les collectivités publiques en faveur de la préservation du paysage et du patrimoine naturel et culturel…

Le parc naturel régional de la Narbonnaise en Méditerranée, compte tenu de sa mission légale, en état des dommages causés par la SARL SOFT au patrimoine naturel compris dans son périmètre, justifie donc l’intérêt direct à obtenir réparation du préjudice environnemental subi par le patrimoine naturel du parc« .
Cette décision est importante sur le plan jurisprudentiel, puisque le tribunal retient que, de par « la mission légale » confiée à un Parc naturel régional, celui-ci peut prétendre à l’indemnisation d’un préjudice environnemental.

Une première judiciaire

Jusqu’à présent, les juridictions françaises prenaient en considération le préjudice sur un plan matériel (ex : replantation d’arbres, restauration d’écosystèmes…). En l’espèce, le préjudice environnemental est fondé sur l’atteinte portée au milieu lagunaire sans qu’il soit possible pour le Parc naturel régional de revendiquer l’indemnisation liée à l’atteinte portée à la faune et la flore aquatique puisque celui-ci ne dispose pas de la propriété de ces dernières. Ainsi, bien que le patrimoine présent sur le Parc naturel régional ne soit pas sa propriété, le Tribunal reconnaît, pour le Parc, l’existence d’un préjudice sur le milieu naturel, patrimoine de la collectivité.

Le chlorpyrifos-éthyl est un insecticide organophosphoré utilisé pour la protection des cultures et la lutte contre des ravageurs tels que les criquets en Afrique du Nord. Il est classé très toxique pour les organismes aquatiques. L’accumulation de cette substance peut se produire dans les poissons et les algues. La substance peut causer des effets à long terme sur l’environnement aquatique.

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