« Le bio ne représente que des fausses promesses »

Gil Rivière-Wekstein, militant écologiste de longue date et auteur de plusieurs livres polémiques comme notamment « Abeilles, l’imposture écologique », mais également d’Agriculture & Environnement (A&E), une lettre d’information indépendante des syndicats et des associations professionnelles, sur les questions environnementales. Dans son dernier livre, « Bio, fausses promesses, vrai marketing » aux éditions Publieur, l’écologiste iconoclaste part en guerre contre les fausses allégations santé du bio.

Malgré certaines crises et peurs sanitaires, pourquoi affirmez-vous que ce que l’on consomme dans notre assiette est sain et sans danger ?

Notre assiette est de très bonne qualité en règle générale, même si cela dépend évidemment de ce que l’on met dedans. Mais globalement, il n’existe pas de problème sanitaire particulier dans nos assiettes. Un discours anxiogène est aujourd’hui véhiculé par la presse, le plus souvent à des fins qui n’ont rien à voir avec la santé. Je pense qu’on peut manger « non bio », être en très bonne santé et vivre très longtemps.

Le bio ne serait donc pas meilleur pour la santé ?

Il existe deux choses qui sont généralement attribuées au bio et qui ne sont pas avérées. La première est que la nourriture bio aurait des qualités nutritives meilleures que les produits issus de l’agriculture conventionnelle. Or toutes les études démontrent que ce n’est pas le cas. Il suffit de comparer des choses comparables. Il est bien évident que si vous comparez un poulet de batterie et un poulet bio, ce n’est pas pareil, mais si vous comparez ce même poulet bio avec un poulet label, la différence de qualité nutritive n’est pas nette.

C’est le parcours agronomique qui définit la qualité nutritionnelle d’un produit et ce n’est pas le fait d’utiliser ou pas des pesticides qui va changer quoi que ce soit dans les qualités nutritionnelles du produit, ou en tout cas à la marge seulement. Il est donc clair qu’il n’y a pas de bénéfice santé sur les produits bio. D’ailleurs, s’il y avait ce bénéfice santé, cela serait prouvé.

Le second argument est qu’il serait moins dangereux de manger du bio que de manger du conventionnel. Mais quand on considère comme moi qu’il n’est pas dangereux de consommer de la nourriture « conventionnelle », cet argument ne tient plus. Soustraire zéro de zéro, cela revient toujours à rien !

Considérez-vous la consommation d’une pomme traitée contre les insectes et les maladies sans danger ?

Si cette pomme a été traitée par de la roténone bio, cela peut poser problème. Attention, une pomme bio peut avoir été traitée mais ça, les gens ne le savent pas. Les pommes bio sont traitées, les produits bio en général sont traités par des pesticides. Ce ne sont simplement pas des pesticides de synthèse, mais naturels, aux effets réels et ayant une toxicité comme tout autre produit.

Donc, tant que vous mangez des produits qui certes ont été traités, mais que les résidus se trouvent en dessous de la limite maximum de résidus, ils sont considérés par les autorités mondiales comme n’étant pas toxiques pour la santé humaine. Je ne pense pas que toutes les agences de sécurité sanitaires du monde soient à la solde de BASF, de Monsanto ou de Bayer. Je pense que tous ces gens-là font leur boulot et que s’ils estiment que ces produits sont sans danger, j’aurai tendance à leur faire confiance, surtout quand ces autorités sanitaires sont diverses et que leurs conclusions sont cohérentes.

Que pensez-vous alors de la position du gouvernement qui souhaite faire passer la part de produits bio à hauteur de 20% dans les repas servis dans les cantines ?

C’est complètement absurde. Si c’est un danger de mettre des produits non bio dans les assiettes, ce n’est pas 20% de bio qu’il faut instaurer pour les cantines mais 100% ! On ne va pas empoisonner les gens un petit peu quand même !

Les gens qui vous disent que l’on va mettre 20% de produits bio dans les cantines savent que la nourriture issue de l’agriculture conventionnelle n’est pas dangereuse, sinon ils ne demanderaient pas de passer à 20% de bio mais à 100%, cela semble logique. Ca montre bien que ce taux de 20% dans les cantines n’est pas fait pour que les enfants soient en meilleure santé, mais pour d’autres raisons.

Vous niez donc les effets bénéfiques du bio sur la santé, et sur l’environnement ?

L’agriculture bio peut être meilleure pour l’environnement dans certains cas, mais elle n’est pas toujours plus respectueuse de l’environnement que certaines pratiques conventionnelles. C’est notamment le cas lorsque l’agriculture bio utilise du cuivre. Prétendre que l’agriculture biologique, c’est l’idéal d’un point de vue environnemental, ce n’est pas vrai. Il existe des pratiques conventionnelles meilleures pour l’environnement que ne l’est le bio. Il faut tout prendre en considération.

Si l’on prend l’exemple du blé, les rendements du blé bio sont de moitié inférieurs à ceux du blé conventionnel. Donc si vous disposez de 100 hectares, que vaut-il mieux faire pour la biodiversité, 100 hectares de blé bio, ou 50 hectares de blé conventionnel et 50 hectares de forêt ? Au-delà de la question du rendement, il y a aussi celle de l’usage de la terre, il faut avoir une vision d’ensemble.

Autre exemple, pour éviter le désherbage chimique, on peut utiliser le désherbage mécanique. Cela nécessite alors plusieurs passages, et plus de passages, c’est plus de consommation de pétrole et donc un bilan carbone moins bon. Il faut prendre l’ensemble des facteurs et là, le bio n’est pas nécessairement ce qui est le meilleur pour l’environnement.

Que ce soit pour l’environnement ou pour la santé, le bio ne représente que des fausses promesses et le consommateur va s’en rendre compte. Si l’on tient compte en plus du fait que les produits bio sont 30 à 70% plus chers, le consommateur finira alors par arrêter d’acheter ces produits.

Le bio est un argument de marketing politique, économique, sociétal, et idéologique. Il renvoie à l’image rêvée d’une société, avec de petites fermes, où le petit gagne face au grand, l’indépendant contre la grosse firme.

Comment vous positionnez-vous face à l’épineuse question des OGM ?

Les OGM sont la solution pour le bio. Le cahier des charges de l’agriculture biologique proscrit la chimie de synthèse. Donc les solutions apportées par les biotechnologies et les sciences de la vie devraient en toute logique être compatibles avec l’idée du bio, et les agriculteurs bio auraient bien tort de s’en priver.

Un OGM Round-Up ready est parfaitement inutile pour le bio qui n’utilise pas de Round-Up. Mais, un OGM résistant à la pyrale par exemple, utilise le même mode d’action que le bio. On a incorporé la bactérie d’un Bt qui est utilisé en agriculture biologique. Le procédé pour se défendre contre la pyrale est donc le même. Je trouve donc ça un peu bizarre que d’un côté les « bio » acceptent de déverser des bactéries entières sur des champs pour lutter contre la pyrale et s’interdisent un OGM qui utilise cette même bactérie pour se défendre contre cette pyrale.

Un autre exemple est celui du mildiou. Entre déverser du cuivre contre le mildiou comme le font les agriculteurs bio et utiliser une pomme de terre résistante au mildiou qui n’aura besoin d’aucun produit phytosanitaire, on voit immédiatement quelle technique est la meilleure pour l’environnement.

Si elles sont utilisées intelligemment, les biotechnologies pourraient être une solution à beaucoup de problèmes à l’avenir, à beaucoup d’impasses dans lesquelles on se trouve aujourd’hui.

Qu’est-ce qui fait barrage aujourd’hui à ce type de discours que l’on n’entend jamais ?

L’idéologie. C’est de l’idéologie. Les OGM on n’en veut pas, point. Prenez n’importe quelle discussion autour des OGM, le nom de Monsanto arrive dans le débat au bout de 3 minutes. Comme si tous les OGM étaient associés à Monsanto? Il faudra un jour sortir de cette impasse et se rendre compte que les biotechnologies en général, c’est autre chose que les OGM de Monsanto.

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