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Déchets nucléaires vs industriels : quelle différence de traitement ?

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Depuis l’avènement des centrales nucléaires, le traitement des matières et déchets nucléaires ont énormément évolué. Moins exposés que l’atome, les autres secteurs industriels gèrent-ils aussi bien leurs déchets ?

Alors que le débat public sur le PNGMDR s’est ouvert le 17 avril 2019 pour cinq mois, le traitement des matières et déchets nucléaires fait l’objet en France d’un processus aussi bien huilé que méconnu. Depuis plus de 40 ans, l’industrie nucléaire française applique, en amont comme en aval du cycle du combustible, des principes savamment étudiés pour la réutilisation des matières valorisables et la minimisation des déchets ultimes. Sur l’ensemble des atomes d’uranium et de plutonium utilisés pour créer une réaction nucléaire, 96 % de la matière peut être recyclée pour fabriquer de nouveaux combustibles. Une fois réenrichi, le stock d’uranium appauvri devrait représenter un gisement d’environ 60 000 tonnes, soit l’équivalent de huit années des besoins actuels du parc nucléaire français. De cette manière, 25 % de l’uranium naturel peut être économisé. Un gramme de plutonium ou 100 grammes d’uranium créent ainsi autant d’énergie qu’une tonne de pétrole, 1,5 tonne de charbon ou 2,5 tonnes de bois. Mais contrairement aux sources fossiles très polluantes pour l’environnement, l’électricité produite par l’atome présente l’avantage d’être décarbonée à plus de 95 %. Fruit de la recherche de l’industrie nucléaire française, l’assemblage du plutonium issu des combustibles usés mélangé à de l’uranium appauvri permet de produire un mélange d’oxydes connu sous le nom de MOX. Ce procédé désormais exporté à l’étranger fournit en moyenne 10 % de l’électricité d’origine nucléaire consommée dans le pays.

Pour ce qui est des 4 % de matières non-valorisables, le savoir-faire français est là aussi particulièrement développé. Effectivement, le procédé de traitement / recyclage mis en oeuvre à la Hague permet de réduire le volume des déchets nucléaires par cinq et la radiotoxicité des déchets par dix par rapport au poids initial des assemblages de combustibles. Chaque année, cela représente moins de 2 kilos par habitant. 90 % du volume de déchets produits présente un faible niveau de radioactivité à durée de vie courte. En attendant leur décroissance, ils sont conditionnés et stockés dans un des trois centres gérés par l’Andra (Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs) au centre de stockage de la Manche, Soulaines-Dhuys et Morvilliers (Aube). Les 10 % restants, ceux présentant une radioactivité moyenne ou élevée à longue durée, doivent être entreposés à plus de 500 m sous la surface dans le futur centre industriel de stockage géologique (Cigéo) qui devrait voir le jour à Bure (Meuse) d’ici 2035. Après plus de 25 ans d’études et de concertation, l’État français a en effet retenu cette solution à la fois sûre et réversible pour éviter aux générations futures d’avoir à s’occuper du problème des déchets nucléaires. Là encore, les volumes sont infimes puisque les résidus à haute activité et à vie longue ne représentent que 0,2 % des déchets radioactifs produits en France…

Plastique et éoliennes : quid du recyclage de ces déchets ?

Tandis que le secteur nucléaire s’est depuis longtemps saisi de la question, d’autres types de déchets industriels continuent de proliférer sans que rien ou presque ne soit prévu pour les traiter et recycler. C’est le cas des éoliennes, dont les composants en béton, fibre de verre et aluminium sont très difficiles, voire impossible à réutiliser. Or d’ici à 2030, le gouvernement veut tripler leur nombre en France pour les porter à 18 000… Les pâles, et notamment l’aluminium qui les composent, posent particulièrement problème d’un point de vue sanitaire car elles ne respectent pas les normes européennes en matière de transition énergétique. « Si on le[s] brûle, cela peut donner des déchets vraiment toxiques, voire des dioxines ou des choses comme ça, et si on le[s] broie, cela peut être aussi très toxique [et] donner des nanoparticules pas du tout saines », dénonce Jean-Louis Butré, président de la Fédération environnementale durable. En Allemagne, 50 000 tonnes de pâles installées à la fin des années 90 devront être démontées en 2020, selon Veolia. Le groupe envisage de les brûler, mais craint que les résidus de matériaux n’endommagent les filtres de ses incinérateurs. « Nous sommes confrontés à un énorme problème », admettait en 2017 le porte-parole d’une société de recyclage allemande.

Plus connu, le cas des déchets plastiques reste néanmoins très problématique. Ce matériau produit en quantité astronomique pollue déjà les terres et mers du monde entier, dont les rejets forment des surfaces flottantes de plusieurs km2 sur les océans de la planète. Les morceaux de plastique seront d’ailleurs bientôt plus nombreux que les poissons… Si une filière de recyclage commence à voir le jour, elle n’en est toutefois qu’à ses balbutiements. Dans le monde, seul 9 % du plastique produit est recyclé, même si la solution à terme consiste à ne plus en produire et à privilégier d’autres matières comme le verre. Coca Cola, qui fabrique chaque année plus de 120 milliards de bouteilles, n’utilise ainsi que 7 % de plastique recyclé. Là aussi, le risque sanitaire est élevé pour les humains comme pour la biodiversité, le plastique contenant des polluants organiques persistants (POP). Il peut également être contaminé par le brome, un élément chimique particulièrement toxique… Les dégâts causés par la pollution ont poussé la Chine à diviser par 20 ses importations de plastique. En passant de 600 000 à 30 000 tonnes par mois entre 2016 et 2018, Pékin a affaibli encore plus une industrie plastique qui produit plus de déchets qu’elle ne peut recycler. Soit à des années lumières du nucléaire et de son cycle fermé…

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