La proposition de Jean-Vincent Placé est discutée aujourd’hui au Sénat tandis que le projet de loi consommation de Benoît Hamon est attendu dans les prochains jours. Fortement orienté autour des droits des consommateurs, en pleine crise écologique, ce projet de loi est l’opportunité de défendre enfin des modes de production et de consommation responsables.
Trop souvent, trop longtemps, nous autres, simples consommateurs avons été soumis aux diktats des producteurs. Aujourd’hui, alors que la pression sur les ressources devient insoutenable, beaucoup de citoyens militent pour la fin de notre « société du jetable » et sont excédés par l’obsolescence programmée, notamment dans la high-tech. Si les Amis de la Terre ont souvent dénoncé l’impact écologique de telles pratiques, notre association pousse aussi de nombreuses demandes. Parmi elle, l’extension de la garantie de tous les biens de consommation à 10 ans. Mesdames et messieurs les députés, soyez-y sensible ! Ne cédez pas aux pressions des producteurs !
Outre ses bénéfices environnementaux, l’extension de la garantie à 10 ans est un moyen de favoriser l’emploi local, la compétitivité des entreprises et de répondre à l’aspiration montante à consommer autrement.
Les 2 ans de garantie actuels laissent la possibilité à certains industriels de mettre sur le marché des produits avec une durée de vie limitée, c’est le cas de l’imprimante Epson qui cessait de fonctionne au bout de 18 000 copie, de l’iPod d’Apple dont la durée de vie était limitée à celle de sa batterie ou encore aux entreprises de ne plus permettre la mise à jour des systèmes d’exploitation au bout de quelques années. A l’inverse, les industriels qui tentent de se démarquer en offrant des produits durables et de qualité ne sont nullement valorisés.
Nous le savons, le modèle de consommation du jetable n’est pas viable : alors que les ressources s’épuisent, de l’énergie, des matières sont prélevées pour être rapidement jetées ; nos consommations ne répondent pas à nos besoins réels et le travail nécessaire à la production de nos biens est dévalorisé.
La réduction de la durée de vie des produits est constatée depuis plusieurs années : l’époque où le lave linge de la grand-mère fonctionnait pendant 20 ans semble révolue. Plus performants lors de leur utilisation, nos produits sont aussi plus polluants à fabriquer, plus fragiles et difficiles à réparer : produits indémontables, pièces détachées indisponibles, etc. Pire, la réparation devient un non sens économique : il est parfois plus cher de faire réparer que d’acheter un produit neuf.
Allonger la durée de garantie à 10 ans revient finalement à sortir de ce cercle vicieux pour aller vers un modèle plus vertueux.
L’allongement de la durée de vie des produits représente un vivier d’emplois plus important que celui du jetable. Si la production nationale peut difficilement rivaliser sur le terrain des prix avec les produits importés des pays à bas salaires, l’engagement résolu dans une production orientée vers la qualité et la durabilité est une voie de compétitivité d’avenir. Nos entreprises ont les moyens de concevoir et de fabriquer des produits durables, réparables, incorporant de manière raisonnée le progrès techniques. Enfin, avec des produits conçus pour être réparés et non pour être jetés, les réparateurs pourront localement valoriser leur savoir-faire et leurs compétences.
L’instauration d’une garantie à 10 ans ne mettra donc en péril que le modèle économique de ceux qui continueront d’écouler des produits de mauvaise qualité. Ces quelques uns s’opposent à toute extension de garantie et se pressent pour que la proposition de loi de Jean-Vincent Placé n’aboutisse pas et que le projet de loi consommation de Benoît Hamon ne contienne pas cette mesure. Un changement radical de nos modes de production et de consommation ne se fera cependant pas sans cette mesure : soutenez la garantie à 10 ans pour tous les biens de consommation !
Par Martine Laplante, présidente des Amis de la Terre
Phillipe Moati, professeur agrégé d’économie à l’Université Paris-Diderot
Frédéric Bordage, co-fondateur de l’Alliance Green IT
Sébastien Lapeyre, directeur du Cniid
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