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« On trouvera des clients pour le pétrole pendant encore longtemps »

jean-louis_schilansky_ufip_1.JPGJean-Louis Schilansky, ingénieur civil des mines, Président de l’Union française des industries pétrolières (Ufip). Il a débuté sa carrière en 1970 dans le groupe Mobil devenu ExxonMobil. Il devient Président de Mobil Europe en 1998 puis Directeur général Europe d’ExxonMobil à Bruxelles. Nommé Délégué général de l’Ufip en 2001, Jean-Louis Schilansky en devient le Président en 2008. Il est par ailleurs membre du conseil exécutif et Vice-Président Trésorier du Medef.

Votre réaction après les attaques violentes de Ségolène Royal sur l’industrie pétrolière française en général, et Total en particulier ?

Il n’entre pas dans les missions de l’Ufip d’intervenir sur les déclarations de personnalités politiques.

Comment expliquez-vous que les prix à la pompe baissent si peu et avec autant de retard sur les cours du brut ?

Les prix des carburants ont fortement baissé ces dernières semaines. Par rapport à la fin de l’été, ils ont baissé de 30 centimes d’euro par litre. Cela représente 18 euros pour qui fait un plein de 60 litres. Quant à dire que la baisse du prix du pétrole brut n’est pas complètement répercutée et l’est avec retard, je ne peux pas vous laisser dire cela.

Toute baisse du prix du brut est répercutée à la pompe. Si le consommateur a l’impression que c’est dans une moindre mesure, cela tient à deux raisons : le prix d’un litre d’essence est composé de plus de 50% de taxes, dont une bonne partie de taxes fixes en centimes d’euro par litre, qui ne varient pas quel que soit le coût du pétrole brut.

Un deuxième élément à prendre en considération, c’est la parité euro/dollar. Un euro fort a amorti la hausse du cours du brut, qui se négocie en dollar, au début de l’année. Sur la deuxième partie de l’année, un euro plus faible ralentit la baisse du prix du baril exprimé en dollar.

Statistiquement nous observons, avec une grande régularité, que les cours du brut se répercutent à la pompe, à la hausse comme à la baisse, avec un délai d’une douzaine de jours.

Quelle est la santé économique de l’industrie pétrolière française ?

L’état de santé de l’industrie pétrolière française n’est pas florissant et plusieurs menaces pèsent sur elle. Il faut savoir que les résultats des compagnies pétrolières sont faits essentiellement dans ce que nous appelons dans notre métier « l’amont », c’est-à-dire l’exploration et la production d’hydrocarbures.

En France, l’industrie pétrolière, c’est le raffinage et la distribution de produits pétroliers. Et là, les choses sont loin d’être brillantes. L’industrie du raffinage est une industrie lourde dans laquelle les investissements sont très coûteux et longs à produire leurs effets. Cette industrie doit aujourd’hui répondre à une demande du marché pour laquelle elle doit s’adapter en permanence.

Je pointe là du doigt le déséquilibre entre la demande d’essence, en baisse, et celle de gazole, qui croissait fortement jusqu’à une date récente. Je veux aussi parler des investissements nécessaires pour répondre aux exigences règlementaires qui se succèdent pour préserver l’environnement.

Du côté de la distribution, les choses ne sont guère plus glorieuses. Les opérateurs se livrent une concurrence farouche sur le marché français qui est l’un des plus concurrentiels d’Europe. Le résultat est qu’il est difficile de vivre de la distribution des produits pétroliers en France.

A quoi sert l’Ufip ?

En forme de boutade, je pourrais vous dire d’aller voir sur www.ufip.fr mais plus sérieusement je résumerais en disant qu’interlocuteur du Gouvernement, du Parlement et de l’Administration, l’UFIP est consultée sur les projets de loi et de réglementations concernant la profession pour exposer son point de vue. Elle est à leur disposition pour leur apporter son expertise professionnelle, fournir des informations techniques ou économiques.

Interlocuteur des organisations syndicales de la branche « pétrole », l’UFIP négocie avec elles les modifications de la convention collective, les évolutions des salaires de la branche, les accords dans le domaine de la sécurité ou de la santé au travail et de la formation professionnelle. Enfin, interlocuteur des médias, l’UFIP répond aux questions et sollicitations de la presse écrite et audiovisuelle sur l’actualité pétrolière.

Quelle est la position de l’Ufip en matière de biocarburants ?

L’industrie pétrolière française utilise déjà, depuis plusieurs années, des biocarburants dans la fabrication des essences et des gazoles. Pour nous, les choses sont claires :  les biocarburants doivent faire la preuve que leur bilan écologique global est positif et ils doivent s’affranchir des soutiens fiscaux sans lesquels ils ne sont pas compétitifs.

L’Ufip mène-t-elle des actions ponctuelles ou suivies avec l’IFP ?

Ni les unes ni les autres.

Y-a-t-il d’autres explications à la chute actuelle des cours du brut que les perspectives de récession mondiale ?

Le ralentissement économique mondial explique la baisse de la demande pétrolière mondiale. Du côté de l’offre, les pays de l’Opep ont bien décidé de réduire leur production d’un million et demi de barils mais apparemment l’offre globale de pétrole demeure supérieure à la demande et le prix du brut baisse?

Quelles sont vos prévisions pour 2009 ?

Je me garderais bien de faire des prévisions en la matière ! Savez-vous me dire combien de temps va durer la récession amorcée ?

Comme beaucoup de membres de l’Opep, considérez-vous que le prix idéal du baril se situe entre 80 et 100 dollars ?

Il n’y a pas de prix « idéal » du pétrole brut. Il y a un prix de marché. Au-delà de ce truisme, les pays producteurs, et pas seulement ceux de l’Opep, comptent sur leurs recettes pétrolières pour financer leur économie. Bien de leurs projets disparaissent si le prix du pétrole brut diminue trop. On peut donc compter sur leurs efforts pour tenter d’ajuster leur production au plus près de la demande. Mais si la demande n’est pas au rendez-vous ou si elle fond comme neige au soleil ?

Le pétrole a-t-il encore de beaux jours devant lui ?

Il y a encore beaucoup d’usages pour lesquels le pétrole est insubstituable ; on trouvera des clients pour le pétrole pendant encore longtemps.

> Pour en savoir + : Site de l’Ufip

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