• Accueil
  • >
  • Interview
  • >
  • Crue centennale de la Seine : « on ne verrait plus les berges »

Crue centennale de la Seine : « on ne verrait plus les berges »

Jean Chevalier

Jean Chevalier, ingénieur en Prévention et Protection des risques industriels chez FM Global, compagnie d’assurance industrielle dommage aux biens et pertes d’exploitation et conseil en prévention des risques. L’expert inondation commente le rapport que vient de publier l’OCDE sur l’impact d’une crue centennale de la Seine, auquel il a collaboré.

Un récent rapport de l’OCDE sur les conséquences économiques d’une crue centennale de la Seine évoque une facture pouvant atteindre la somme astronomique de 30 milliards d’euros. Comment peut-on atteindre un tel chiffre ?

L’OCDE propose une fourchette comprise entre 3 milliards et 30 milliards d’euros, qui correspondent au cumul des dommages directs que pourraient engendrer une crue centennale de la Seine. Il s’agit ici des dégâts provoqués par l’inondation, dans les parties basses comme les sous-sols notamment mais aussi les zones submergées en cas de crue de la Seine.

Quels seraient les bâtiments touchés ?

Un inventaire global a été fait, des établissements publics aux bâtiments privés susceptibles d’être impactés par cette crue, de part et d’autre de la Seine. A titre d’exemple, je crois me rappeler que beaucoup d’hôpitaux parisiens pourraient être concernés, mais aussi la Bibliothèque nationale, de nombreux musées, les infrastructures de la RATP comme le métro, mais aussi de très nombreux commerces et bâtiments privés.

A quoi correspond exactement une crue dite centennale ?

Le scénario pris en compte, c’est donc celui d’une crue centennale, et plus précisément celle de 1910, date à laquelle la Seine avait atteint un niveau historiquement haut. Cette simulation permet de mesurer l’impact qu’une telle crue pourrait avoir sur le tissu économique actuel, qui concernerait 5 millions de Parisiens.

Et la crue serait de quel ordre de grandeur ?

On ne verrait plus du tout les berges par exemple avec des inondations dans de nombreux quartiers de Paris, notamment dans le 5e, le 6e et le 8e arrondissement. Quasiment toutes les zones limitrophes de la Seine seraient touchées. La hauteur de débordement de la Seine pourrait atteindre plus de 1 mètre au-dessus de la surface et toutes les parties en dessous du niveau du sol seraient bien sûr inondées.

Une telle crue est-elle envisageable ou est-elle surtout virtuelle et mathématique ? Dans quelles conditions pourrait-elle survenir ?

Grâce à cette crue de 1910, on a pu comprendre ce qui s’était passé et mieux anticiper pour éviter que cela se reproduise. Lors de cette crue, la France avait connu une série de perturbations successives qui avaient alimenté tout le bassin versant de la Seine qui avait fini par déborder.

Qu’a-t-on fait justement depuis 1910 pour éviter qu’une telle crue se reproduise ?

On a créé 4 barrages réservoirs construits en amont de Paris. Ils ont pour principal objectif de collecter les eaux en amont de Paris pour prévenir et retarder les risques de débordement de la Seine lors d’une situation comparable à celle rencontrée en 1910.

A l’époque, il aurait fallu contenu un volume d’eau évalué à 1 milliard de m3 d’eau. Pour donner un ordre d’idée, le volume des barrages correspond environ à 830 millions de m3. Mais ces barrages ont également un autre objectif, celui d’alimenter en eau potable l’ensemble du bassin parisien.

Avec un hiver pour l’instant très pluvieux, comment se comportent ces bassins, sont-ils déjà remplis ?

Ils doivent être suffisamment remplis pour pouvoir répondre à la demande en eau potable de  millions de personnes, mais aussi pouvoir écrêter les crus potentiels en cas de fortes pluies. La gestion de ces barrages doit donc être rigoureuse. Ils sont en général pleins, à hauteur de 60 à 80%.

  • facebook
  • googleplus
  • twitter