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Notre s�curit� sanitaire n’est pas suffisamment bien assur�e

laurent_chevallier.JPGDr Laurent Chevallier, praticien attach� au CHU de Montpellier, en charge du p�le Nutrition de plusieurs cliniques. Il est �galement l’auteur de diff�rents ouvrages concernant la nutrition dont le dernier vient de para�tre � Les 100 meilleurs aliments pour votre sant� et la plan�te � aux �ditions Fayard.

Vous �tes l’auteur de nombreux livres, qu’apporte celui-ci ?

Je crois que c’est l’un des premiers� livres guidant le consommateur sur les choix alimentaires � faire qui associe � la fois des pr�occupations de sant� et de pr�servation de la plan�te. J’explique aussi comment on peut manger moins cher, en fonction non pas du prix des aliments mais de son budget global.

On peut �liminer un certain nombre de produits comme, par exemple des desserts lact�s type Actimel qui n’a pas beaucoup plus d’int�r�t qu’un yaourt nature classique de la m�me marque mais qui est beaucoup plus cher, l’id�al �tant de faire soit m�me ses yaourts pour �viter de g�n�rer des d�chets. Les �conomies r�alis�es dans un cas comme dans l’autre doivent permettre d’acheter des fruits et l�gumes de bonne qualit�.

Autre exemple, je d�nonce la consommation abusive des BRSA (Boissons rafra�chissantes sans alcool) c’est-�-dire des sodas, jus industriels divers qui gr�vent le budget tout comme l’achat des eaux en bouteille, alors qu’il suffit de boire de l’eau du robinet. Il faut rappeler que l’eau est la seule boisson v�ritablement d�salt�rante et boire l’eau du robinet, c’est autant de d�chets g�n�r�s en moins.

Ce livre est �galement un v�ritable guide de produits recommandables avec des noms de marques. L’approche est r�solument positive mais je mets aussi en garde en dressant une liste de produits � �viter ou � boycotter.

A quoi correspond la liste noire que vous dressez ?

Il s’agit d’une quinzaine de produits ou ingr�dients qui ne sont pas forc�ment tous dangereux, mais qui posent un certain nombre de probl�mes comme par exemple un d�faut d’information. Pour la plupart des colas, � quoi correspond pr�cis�ment la mention � extraits v�g�taux � ? Vous para�t-il normal de consommer un produit dont on ne connait pas la totalit� des �l�ments qui le compose ?

S’agissant du soja, on a d�fini une dose quotidienne d’isoflavone qu’il est pr�f�rable de ne pas d�passer (1 mg d’isoflavone par kilo de poids corporels soit 60 mg pour une personne de 60 kg). Or ce taux d’isoflavone n’est pas indiqu� sur les produits � base de soja, et en cons�quence, il vaut mieux �viter � mon sens d’en consommer. On sait en effet que la surconsommation d’isoflavone peut favoriser la survenue de cancer du sein chez la femme, et peut diminuer la concentration en spermatozo�des chez l’homme dans les pays occidentaux. Attendons une r�glementation mieux adapt�e qui imposera la mention de la concentration en isoflavone.

Par ailleurs, je trouve singulier de constater encore la pr�sence d’additif du type E320 dans les chewing-gums alors qu’il est class� � canc�rog�ne possible � par les instances internationales. Les parab�nes sont aussi autoris�s comme conservateurs� alimentaires, certes ils sont m�tabolis�s, mais tout de m�me, les industriels peuvent s’en passer. On utilise aussi beaucoup trop l’huile de palme dans l’industrie agroalimentaire, ce qui favorise la d�forestation massive ; peut-on imaginer �tre en bonne sant� sur une plan�te malade ?

N’est-ce pas une pr�occupation d’occidental trop g�t�, alors que des millions de personnes ne mangent pas encore � leur faim ?

Non, non et non. Une certaine forme d’alimentation industrielle a particip� � l’augmentation tr�s massive des diab�tes, des maladies cardiovasculaires, et � la survenue de nombreux cancers, m�me si leur origine est souvent plurifactorielle et cela partout � travers le monde. Quand on compare avec les ann�es 80, on constate un doublement du nombre de cancers en France, avec des maladies de l’environnement qui sont encore ni�es ou insuffisamment prises en compte.

Heureusement, il y a un mouvement de fond dans la population qui souhaite faire �voluer sa consommation. Par ailleurs, il existe un certain nombre d’industriels qui s’engagent dans une dynamique plus vertueuse malgr� une r�glementation � la traine.

Est-ce qu’une agence comme l’Afssa (Agence fran�aise de s�curit� sanitaire des aliments) joue pleinement son r�le ?

On est �tonn� de la faiblesse des politiques de sant� publique face � des dangers de plus en plus document�s. Pourquoi les acides gras trans d’origine industriels ne sont-ils pas interdits, alors qu’ils sont d�l�t�res� sur le plan cardiovasculaire, et qu’on a des doutes sur leurs possibles effets canc�rig�nes. Pourquoi n’indique-t-on pas le taux de sel dans les produits transform�s ? Ce sont deux exemples tr�s pr�cis concernant des mesures que je souhaiterais voir mises en place tr�s rapidement.

Les agences ont certes un r�le d’�valuation des risques mais � quoi servent-elles si les �valuations ne sont pas suivies d’effets ? Par ailleurs elles sont soumises aux recommandations d’Agences europ�ennes. Le r�le des agences nationales n’est-il pas � red�finir ?� Il existe aussi une bonne douzaine d’agences sanitaires, c’est un v�ritable mille-feuilles d�pendant de minist�res diff�rents…

Mais l’EFSA (l’agence europ�enne de s�curit� des aliments) rend des avis en principe ind�pendants?

Cette agence rend des avis supranationaux qui sont parfois tr�s surprenants � l’exemple de celui rendu sur le Red Bull. L’Afssa avait publi� des avis n�gatifs et finalement les pouvoirs publics ont d�cid� d’autoriser ce produit parce qu’il �tait autoris� dans plusieurs pays europ�ens et l’Afssa s’est ensuite rang�e � cet avis ! Les enjeux �conomiques imm�diats prennent trop souvent le pas sur les enjeux sanitaires.

La s�curit� sanitaire est donc insuffisante ?

Il existe aussi manifestement des insuffisances d’�valuations en mati�re sanitaire. C’est notamment le cas avec le bisph�nol A et l’aspartame pour lequel on a des doutes scientifiques. Des �tudes ne sont pas prises en consid�ration ou insuffisamment, ce qui est une erreur, m�me si leurs� m�thodologies ne correspondent pas toujours aux normes �dict�es.

La curiosit� scientifique ne doit-elle pas primer ? Bref, � mon sens, notre s�curit� sanitaire n’est pas suffisamment bien assur�e sur le plan chimique compte tenu de l’ajout ahurissant d’additifs alimentaires (colorants, conservateurs?) dont les interactions entre eux n’ont m�me pas �t� suffisamment �valu�es, notamment pour la femme enceinte dont le f?tus est extr�mement vuln�rable. On est en droit d’attendre des d�cisions plus adapt�es.

Vous mettez �galement en cause ce que vous qualifiez de � bouffe yankee � ?

Ces produits que je critique, ce sont par exemple les c�r�ales du petit-d�jeuner, avec des p�tales dont le mode de cuisson entra�ne la formation d’acrylamide (NDLR : mol�cule � probablement canc�rog�ne� pour l’homme �). Mais il s’agit �galement des sodas ou encore des nuggets dont la composition laisse parfois � d�sirer.

Si vous deviez donner 3 conseils d’alimentation ?

Tout d’abord faire attention aux additifs alimentaires. Il faut �viter par principe les produits qui contiennent plus de 3 additifs alimentaires, m�me si cela est un peu arbitraire, car ils ne sont pas tous � consid�rer de la m�me mani�re.

Deuxi�mement, se d�tourner de cette nourriture � yankee � – les anglo saxons cherchent eux m�me � s’en �loigner -, et enfin privil�gier une alimentation la moins transform�e possible. Une certaine forme d’alimention industrielle� a particip� aux ravages sanitaires que l’on conna�t actuellement comme l’ob�sit�.

En revanche, je suis tout � fait favorable aux produits surgel�s pour les produits de base, car cela permet une conservation adapt�e m�me si elle induit une d�pense �nerg�tique. L’id�al est n�anmoins de se fournir en produits frais et de devenir des � locavores �, c’est � dire privil�gier une alimentation issue de produits locaux comme l’humanit� l’a fait pendant 20 si�cles.

> Pour en savoir + :� � Les 100 meilleurs aliments pour votre sant� et la plan�te � aux �ditions Fayard – avril 2009 – Dr Laurent Chevallier

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